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Le collège St Joseph, l’austère église de Zuweila, et le couvent de St George dominent l’entrée de l’ancien Haret el Yahoud . À travers un dédale de ruelles étroites, hier encore sales et défoncées, mais ce matin là déjà asphaltées et pavées, j’apercevais le minaret contemporain de la Mosquée Rahim qui surplombe la modeste Synagogue voisine de Rab Moshé. Tout un symbole de l’ancienne tolérance –la présence des « ahl el kittab » , séparés de quelques mètres, dans ce quartier du Mouski datant dès l’origine de la construction du Caire. C’est anxieux que je me rendais à la dédicace de la reconstruction de la Synagogue et de l’antique Yeshiva du Rambam en ce dimanche 7 Mars 2010 ; ni l’environnement urbain, ni la haie d’honneur formée par les services de sécurité pour notre protection n’en était la cause.
À mesure qu’approchait ce grand jour, je m’étais dit : à quoi bon tout çà ? Que pouvait-on attendre de cette restauration et de cette célébration au delà de l’inéluctable exploitation touristique à venir? J’avais lu un poème d’Emma Lazarus dont les strophes suivantes résonnaient :
The funeral and the marriage, now, alas!
We know not which is sadder to recall;
For youth and happiness have followed age,
And green grass lieth gently over all. »
« El lé fat, mat » …
Une promesse avait été faite par le Ministre de la Culture au travers des responsables du Conseil Supérieur des Antiquités Égyptiennes (CSA) devant le Rabbin Baker représentant l’American Jewish Commitee, Mme Carmen Weinstein - Présidente de la Communauté Juive du Caire -, Messieurs Roger Bilboul Alec Nacamuli et moi-même de l’Association Internationale Nébi Daniel, début 2006. Elle concernait la restauration des 10 Synagogues sous leur tutelle. Mme Weisnstein se battait pour cela depuis déjà 10 ans. Rab Moshé était sa priorité absolue car la plus symbolique connue de tous les Juifs d’Egypte, un pont entre l’antique communauté et la plus récente.
Depuis les expulsions et les départs contraints des Juifs d’Égypte, le lieu était décrépit en dépit des efforts, vaillants et généreux, de M. Vatouri pour une remise en état. La montée des nappes d’eaux souterraines et le tremblement de terre de 1992 achevèrent sa dégradation ; c’est une ruine totale à ciel ouvert que je découvrais en 2006.
Le CSA allait-il vraiment pouvoir tout drainer ? Tout étanchéifier? Tout reconstruire et solidifier ? Bien financer la totalité de ces travaux d’environ 2 millions $ ? En Août 2009 nous étions confiants, au vu du chantier démarré un an plus tôt, mais Mme Weinstein aurait –elle la force de mener à son terme le projet qui lui tenait tant à cœur malgré les vicissitudes politiques ?
En Novembre 2007, nous avions pu déjà exprimer notre émotion à voir la rénovation des façades de la Synagogue Shaar Hashamayim . Mais l’absence d’aspect proprement Juif de la célébration - à part une sonnerie de shofar -, avait teinté notre joie d’un regret nostalgique. Qu’en serait-il de la célébration de « la Rab Moshé » et la Yéshiva de Maimonide, lieu chargé de ferveur, réceptacle d’innombrables prières intimes et pressantes, source de guérison ou d’espoirs pour tant de Juifs de toute l’Égypte ?
Une très longue histoire et d’innombrables évènements familiaux rattachaient viscéralement cette Yéshiva en désuétude aux Juifs de notre antique communauté. Ma regrettée Nona , comme d’autres, tant et plus depuis le 13° siècle, y avait imploré la guérison de sa mystérieuse maladie, en y dormant une nuit, priant que l’esprit du grand médecin que fût Maimonide opèrerait quelque miracle par delà l’espace et le temps. Chaque Juif d’Égypte connaît quelqu’un qui a invoqué les remèdes virtuels de Rab Moshé ! Ne dit-on pas que le Roi Fouad lui même y avait fait déposer son manteau pour mieux guérir, en se couvrant de la protection et des remèdes du Sage de Fostat ? Ce dernier n’avait –il pas de son vivant déjà soigné la famille de Saladin et Richard Coeur de Lion ? Tikun Olam ! Depuis, Maimonide a dû se retourner plus d’une fois dans sa tombe, lui qui cherchait logique dans miracle et réprouvait le culte des saints ou des esprits !
Deux Moshé, tous deux ayant bu l’eau du Nil ont illuminé le monde par leur enseignement, le Moïse biblique et le Moïse qui, au Caire, réconciliant foi et raison prôna le juste milieu, loin des extrêmes en toutes choses. « Mi Moshe ad Moshe, lo kam ke Moshe » lit –on sur la tombe de Maimonide à Tibériade. Excusez du peu ! Mais si le Rambam est bien ainsi au cœur de la pensée juive, son reposoir dépouillé est demeuré au cœur des Juifs d’Égypte, de leur vécu familial le plus intime, comme de leur imaginaire. « Rien… ne peut faire oublier l’éclat et le mystère de l’académie souterraine de Maimonide » écrivait le regretté Jacques Hassoun .
Or voilà qu’après les images de synagogues d’ici ou de là, saccagées et pillées, vendues ou occupées, reflétant je ne sais quelle bêtise humaine, qu’après des années de déni de l’histoire de notre communauté, c’est l’Égypte même, qui restaure complètement cet ensemble et les autres, grâce à la volonté de son Ministre de la Culture M. Farouk Hosny et grâce au Secrétaire Général du CSA, loin des extrêmes. Miracle ? Non …Sagesse séculaire retrouvée de mon pays natal.
M.Ayman Hamed responsable des travaux me disait lors d’un voyage précédent « C’est ta maison mais c’est aussi un peu la mienne et je suis heureux de l’avoir restaurée pour toi et pour que l’on puisse ici mieux apprécier Maïmonide qui a vécu si longtemps en Égypte ». C’est son cœur, autant que son intelligence, qui a guidé ses mains à consolider la structure, à remplacer les colonnes de marbre, à retrouver et reproduire à l’identique les détails d’origine. Aux yeux de cet ingénieur, l’aura de Rab Moshé et la tolérance de son temps continuent ainsi à se déposer sans distinction sur nous tous, Juifs et Musulmans, à l’instar de la poussière que lui ne cessait de remuer depuis deux ans ! Miracle ? Non …Espoir sans cesse renouvelé de jours meilleurs.
Mme Weinstein, la Présidente de la Communauté Juive du Caire, pouvait être fière. Elle avait pu veiller à chaque instant aux moindres détails : de la couleur des vitraux à celle des ventilateurs, tout en ménageant les susceptibilités. En dépit de ses soucis de santé, frêle et claudicante, faisant face aux critiques de toutes parts, malgré une opinion publique variant au gré du bon vouloir aléatoire des médias, elle tint bon la barre. Avec volonté, détermination et brio, elle offre aux Juifs du monde mais surtout aux Juifs d’Egypte l’illumination du passé glorieux de ce grand sage, de sa communauté, et de son pays d’adoption - Honneur et dignité affirmés avec éclat. Miracle ? Non… Chapeau bas et grand merci …
Venus des USA, de Grande Bretagne, de France, de Suisse, d’Allemagne et même d’Alexandrie ( !) ils et elles le devaient à leurs parents, mais à la réflexion, et peut être le découvrirent-ils, ils étaient là pour leur compte. Ils n’allaient pas être déçus du voyage. Mais l’absence de nos frères d’Israël nous a tous attristés.
La présence de Mme l’Ambassadeur des USA, de M. les Ambassadeurs d’Israël, (ancien et nouveau), de l’Ambassadeur d’Autriche, des représentants du Ministre espagnol M. Moratinos, du rabbin Baker ont conféré par leur présence et leurs discours une solennité attendue. Mais je fus profondément touché par le rythme et l’énergie spirituelle d’une douzaine de Chabad venus d’Israël le jour même, barbus magnifiques, virevoltants tel un nuage d’étourneaux. Voilà que nous chantions et dansions la hora au son de Hevenou Shalom alekhem, Taher Libenou, Simantov Mazal Tov. Cette scène, se déroulant sous les Kandils rutilants et les yeux non moins brillants de l’assistance, avait quelque chose de surréaliste. Qui eût pu le croire ? L’Association Internationale Nebi Daniel avait préparé un tiré à part pour l’occasion reprenant le poème Ygdal Elohim Haï inspiré des 13 articles de la foi de Maïmonide. Il était en hébreu, arabe, français et anglais. J’eu l’honneur d’emmener le chant puis de réciter un Kaddish.
C’est Maimonide qui conseillait d’inculquer, chacun à son enfant, l’attachement au Judaïsme en lui apprenant dès le plus jeune âge le « Shéma Israël » . Le Rabbin Chabad nous fit d’ailleurs réciter tels des enfants les deux premiers versets. Aussi lorsque le Rabbin libéral Andrew Baker de l’AJC, qui avait tant œuvré depuis 4 ans pour arriver à ce jour, consacra le nouvel ensemble en apposant la Mezouzah à la porte, je me revis à Kippour ce 15 Septembre 1956, une dernière fois sous le taleth de Papa, au grand temple Eliahou Hanabi d’Alexandrie, à la place nominative qu’occupait déjà son propre père. Je mesurai le difficile chemin parcouru depuis lors par toutes nos familles à travers le monde, résignées mais vaillantes et fières. Comme plus tard mes enfants et petits enfants à leur tour, j’ânonnais alors, sans comprendre « Ou Khetavtam al Mezouzot Betekha ». Aujourd’hui je comprenais et l’émotion me saisit.
Tant de Mezouzot avaient été décrochées dans ce pays, accompagnant les pleurs et les peines du départ. Combien étaient-ils qui, comme Maman, avaient emmené leur Mezouzah en exil laissant leur clé pour toujours ? On leur avait tout retiré, mais ils s’accrochaient au symbole de leur maison, de leur histoire et, pour certains, de leur foi.
- Mais ce jour enfin nous pouvions répondre à nouveau, individuellement et collectivement, volontairement et dans la joie, à l’injonction du Deutéronome « al Mezouzot Betekha ! » et Salomon le roi nous guidait pour le crédit « Si l’Éternel ne bâtit pas la maison, c’est en vain que peinent ceux qui la construisent » . Aussi, fidèle parmi les fidèles d’un jour, j’acceptais volontiers l’augure en conclusion d’Emma Lazarus: The sacred shrine is holy yet .
- Enfin en ce jour, au vieux quartier Juif du Caire, tant de prières anciennes et passées se mêlaient à tant d’émotion, d’espoir et de prières pour l’avenir. Prières et espoirs, torches incandescentes, témoignages d’amour, en ce lieu anciennement magique, peut être, mais au demeurant toujours symbolique et central à la Mémoire de tous les Juifs - en particulier à celle des exilés d’Egypte. En ce jour, ces témoins ardents de notre histoire aidaient l’Égypte à se réapproprier la sienne grâce à notre représentant illustrissime, Moshe Ben Maïmon, qui n’approuvait pas des Mezouzot !
Miracle ? Mais oui ! L’ultime miracle de Maimonide!
Cette générosité, unique et exemplaire pour l’ensemble de tous les pays de la région, est l’expression par l’Égypte que notre identité est partie de la sienne. C’est un premier pas sur une longue route... On se rappelle toujours du premier pas, et seul compte la route.
Elles sont belles tes Demeures Ô Jacob !....la Maison de notre Mémoire aussi.
Yves Fedida
7/03/2010-11/03/2010, Le Caire - Paris.
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